Saint Montan 24 février 2024
Ce samedi nous étions seize à retrouver Maryse Aymes et Philippe Barth qui avaient réuni leurs talents pour faire admirer et comprendre la géologie autour de Saint Montan. Cerise sur le gâteau deux membres de l’association locale San Samonta: Alain Fambon un excellent érudit local et Bernard Hennevin nous ont présenté quelques intéressants éléments du patrimoine de ce superbe village.
La visite commence sur le parking taillé dans le calcaire urgonien du Barrémien moyen au Bédoulien inférieur ( Aptien) au dessus du village . Le calcaire est massif de couleur beige rosé, et on peut y voir de nombreuses coquilles de bivalves réparties de façon irrégulière dans la roche, nous avons trouvé un fossile de gastéropode, les fossiles ont l’air en place et entiers. La pate fine qui a l’air azoïque est sans doute farcie de microfossiles visibles en lame mince au microscope.
L’observation de la roche permet de faire de la paléoécologie et de la paléogéographie : il y a cent quinze millions d’années une mer chaude la Thétys est entourée d’une plate-forme où vivent polypiers, rudistes, nérinées, et spongiaires, des zones de hauts fonds bioconstruites (appelé biostrome) par des rudistes parfois associés à des coraux forment une sorte de barrière « récifale » discontinue qui sépare le lagon de la mer profonde plus à l’Est.
Philippe nous explique comment on peut, avec un peu d’expérience, déterminer si le dépôt s’est fait dans le lagon, la pleine mer ou si on est devant les restes de la barrière de corail elle-même. Il est rappelé que l’urgonien est bien un facies et pas un étage stratigraphique.
Nous sommes tous intrigués par la présence sur l’affleurement de trous de mines faits pour agrandir le parking et d’où sortent encore les fils électriques des détonateurs, ce qui n’est pas banal et pas très rassurant.
Nous traversons vers le sud la faille de Saint Montan pour nous retrouver en dessous du village dans des terrains juste un peu plus jeunes du fait du jeu de la faille. Ici les roches témoignent d’une période troublée de sédimentation marine qui, du Bédoulien supérieurà l’albien voit se developper en alternance des dépôts de profondeur contenant des apports terrigènes (ici des marnes noires à Belemnites ) et des dépôts de proche littoral (marnes, grès, sables, calcaires argileux et gréseux) .
Si les belemnites ont fait défaut dans le banc marneux au dessus, dans les calcaires gréseux du gargasien (Aptien sup) nous recherchons avec succès quelques petits oursins d’environ 1.5 centimètres de diamètre sur lesquels on a pu observer souvent les tubercules qui attachent les piquants.
Nous montons ensuite par le hameau de Valescure voir les dépots suivants dans la série stratigraphique : les sables rutilants ( Albien inf et moyen) . Parfois ces sables sont un peu plus cimentés et ont même pu servir de pierres de construction mais souvent le sable n’a été utilisé que pour la confection de mortiers et d’enduits, mélangé à la chaux produite localement. On n’observe pas de stratifications dans ces dépôts. De petits jardins potagers ont été installés sur les sables car ils possèdent de petites nappes perchées. Auusi chaque jardin possède son puits et un intéressant et rustique système d’irrigation (gourges et béalières). Des petits abris pour le matériel ont été creusés dans le sablon le plus endurci et servent de cabanes aux horticulteurs.
Après le déjeuner nous allons observer un dépôt de terre glaise affleurant au bord de la route , témoin de l’invasion marine de la ria Pliocène du Rhône, après la crise messinienne dont Philippe nous expose avec clarté le déroulement.
Cette argile était exploitée et utilisée pour la poterie et des tuileries dans toute la basse vallée du Rhône.
Philippe expose l’histoire de la vallée du Rhône devant un point de vue exceptionnel d’où nous apercevons les Alpes les dentelles de Montmirail et les collines de Bollène .
Puis nous allons vers la chapelle antique ( XI-XIIéme ) San Samonta que nous ouvre Alain Fambon. Juste à coté de la chapelle une étroite lame de calcaire induré, couronné d’un ancien pigeonnier souligne le tracé d’une jolie petite faille.
Un réseau karstique s’est développé autour de la faille et capte les eaux environnantes. Cette résurgence alimentait un réservoir et un moulin situé dans le village. Des béalières irriguaient les jardins au bord du ruisseau.
Au bord du Val Chaud il y a, longeant la faille, la sortie de plusieurs karsts. Il y a donc un lien net entre la faille et les dissolutions. On remarque sur la photo le pigeonnier construit sur la lame calcaire.
Un réseau karstique s’est développé autour de la faille et capte les eaux environnantes. Il y a sous la chapelle une jolie résurgence qui coulait à flot lors de la visite.
Cette résurgence alimentait un réservoir et un moulin situé dans le village. Des béalières irriguaient les jardins au bord du ruisseau.
Notre guide Alain Fambon nous montre une carriére médiévale . Les carriers ont peut être été attirés par le calcaire induré près de la faille.
On voit sur l’affleurement l’ ébauche d’une découpe de pilier hexagonal.
De retour enfin vers les voitures en traversant le pittoresque vieux Saint-Montan nous pouvons admirer une fresque émouvante du 14éme siècle récemment restaurée.
Un grand merci à Maryse et Philippe – et bien sûr Alain- pour cette très belle journée bien sympathique et instructive.
texte de Philippe Chevallier